Alice Dubus, souffleuse de verre scientifique.
De retour de Murano, LMdO pouvait légitimement penser avoir fait le tour de la question du verre. Et pourtant, dans les arcanes de l’Université de Liège se cache une jeune femme aussi modeste que précieuse pour la communauté scientifique : Alice Dubus, souffleuse de verre scientifique
Nous l’avons rencontrée et suivie une journée durant au milieu de son grand atelier niché au cœur du complexe hospitalier du Sart Tilman à Liège. Rencontre …
Souffleuse de verre
LMdO : Un atelier de verrerie au milieu d’une université, une jeune femme aux commandes et manifestement, beaucoup de travail … racontez nous comment tout cela est arrivé …
Alice Dubus : J’ai une formation de chimiste. A la sortie de mes études, une seule chose était claire dans mon esprit : je n’avais pas envie de passer ma vie dans un labo à faire des centaines de fois la même analyse … alors lorsque l’université a publié un avis de recrutement pour l’atelier de verrerie, ma curiosité a été immédiate. Je ne connaissais même pas l’existence du département, je n’avais aucune idée de la nature du travail et je n’avais jamais songé au verre … et voilà une quinzaine d’années que je pratique ce beau métier : souffleuse de verre …
LMdO : Vous débarquez donc dans les années 2000, sans aucune formation au métier de souffleuse de verre ?
AD : Absolument aucune … c’est l’ancien verrier en place qui a assuré ma formation, en à peine deux ans. La première journée en atelier lors de la phase finale de la sélection est restée gravée dans ma tête. J’ai adoré ce premier contact avec le verre dont j’ignorais tout. J’avais tout à apprendre. Heureusement, j’ai décroché le job, j’adore mon métier, je le vis comme une passion. D’ailleurs, je crois que le virus est tenace si j’en crois la fréquence des visites de Marcel, mon prédécesseur pensionné depuis de nombreuses années. Il ne se passe pas un mois sans qu’il ne revienne à l’atelier. Cela me permet d’encore lui demander des petits conseils car certaines demandes sont parfois uniques et son expérience m’est précieuse. En parlant de virus, je ne prends jamais mes congés d’une traite, il faut que je revienne à intervalles réguliers à l’atelier sinon, le verre me manque.
Ce qui est formidable, c’est que la monotonie ne fait pas partie de mon quotidien. Redonner vie à du matériel scientifique en le réparant me motive. C’est à chaque fois un petit défi à relever
. Mes clients retrouvent leurs pièces avec bonheur car ils réalisent de belles économies. Certains équipements sont facturés très chers à l’achat et méritent mieux que de terminer à la poubelle à la première casse. Mais parfois mes commanditaires arrivent à l’atelier avec un plan complet à réaliser. Je ne fabrique rien de ce que l’on peut trouver sur catalogue mais par contre, j’adapte, je transforme et je réalise des montages uniques. Le verre est une matière vivante, parfois un peu frustrante car les tensions provoquées par la montée en température avec les chalumeaux de travail font parfois casser le montage … l’expérience aidant, ça m’arrive de moins en moins ….
LMdO : Une telle passion pour le verre n’éveille t’elle pas d’autres horizons plus artistiques ceux-là ?
AD : Je me considère comme une technicienne du verre, pas une artisane et encore moins une artiste. Mon métier reste pragmatique à mes yeux. Je suis là pour rendre service.
LMdO : Pragmatique mais avec un grand souci du détail, voire de l’esthétique …
AD : C’est pour cette raison que je souffle, c’est pour donner à mes soudures de belles formes homogènes. Je travaille mes symétries et je fais en sorte que mes pièces soient esthétiquement agréables à voir. Les alignements sont importants. Peut-être qu’un jour, je passerai à des créations plus personnelles mais aujourd’hui, je m’épanouis dans mon travail et j’en profite pleinement.
Remerciements : Prof. Jean-François FOCANT. ULG Ateliers généraux de la Faculté des Sciences
Spécialiste des ateliers depuis une dizaine d’années, Patrice Niset vous emmène au cœur de l’excellence et des beaux gestes. Il vous fait découvrir l’envers du décor. Patrice est passionné par les gens passionnés et fiers de leurs métiers !
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